Vue de l'usine ArcelorMittal de Florange, le 9 janvier 2013

Vue de l'usine ArcelorMittal de Florange, le 9 janvier 2013

afp.com/Jean-Christophe Verhaegen

Le projet de loi présenté en conseil des ministres par Emmanuel Macron prévoit en effet d'obliger les actionnaires des entreprises de plus de 150 personnes connaissant des difficultés à vendre leurs actions pour permettre une reprise.

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L'objectif est "d'augmenter la possibilité pour une entreprise de poursuivre son activité et de conserver ses salariés, même en situation de difficultés", selon Bercy.

Quand une augmentation du capital paraît être la "seule solution", pour éviter une "disparition" de l'entreprise, le tribunal de commerce pourra, à la demande de l'administrateur judiciaire ou du représentant de l'Etat, faire "adopter la modification du capital prévue par le projet du plan de redressement, énonce le texte.

Le juge pourra "en ultime recours (...) obliger la vente des actions des personnes qui contrôlent une entreprise en difficulté au profit de personnes présentant un plan crédible de sauvetage de l'entreprise et de maintien de l'emploi", explique le ministère de l'Economie dans son dossier de presse.

Précisément, le tribunal de commerce pourra "désigner un mandataire chargé de convoquer l'assemblée compétente et de voter l'augmentation de capital en lieu et place du ou des associés ou actionnaires ayant refusé la modification du capital". Il aura ensuite la faculté d'"ordonner" la cession d'actions, selon le projet, qui propose aussi de créer des tribunaux de commerce "spécialisés pour les plus grandes entreprises en difficulté".

Ce texte passera-t-il au radar du Conseil constitutionnel' Le Conseil d'Etat, saisi du projet de loi Macron, a été sur ce point plus indulgent que sur d'autres.

Selon son avis mis en ligne par France Inter, la plus haute juridiction administrative estime "que cette atteinte aux droits de l'actionnaire répond à l'objectif d'intérêt général de préserver l'activité d'une entreprise d'une importance économique et sociale avérée".

-'Un casse-tête épouvantable' -

Il a estimé également que les risques de constitutionnalité autour de la "dilution forcée" des pouvoirs de l'ancien propriétaire "pouvaient être surmontés".

En mars, la proposition de loi Florange, née d'une promesse de François Hollande, sur la reprise de sites rentables déposée par des députés socialistes, écologistes et radicaux de gauche avait subi un revers devant le Conseil constitutionnel.

Saisis par l'UMP, les Sages avaient jugé que l'obligation pour un employeur d'accepter une offre de reprise sérieuse ainsi que la compétence confiée au tribunal de commerce pour l'apprécier, avec des sanctions à la clé, constituaient une atteinte au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre.

Au final, le gouvernement avait repris dans sa loi sur l'économie sociale et solidaire votée en juillet seulement deux mesures: d'une part l'obligation de rechercher un repreneur en cas de projet de fermeture d'un établissement; et d'autre part la possibilité pour l'administration de demander le remboursement d'aides versées dans les deux années précédentes en cas de fermeture d'un site pour lequel existait un repreneur.

Lors de la campagne présidentielle de 2012, François Hollande avait promis à Florange de faire voter une loi contraignant les "grandes firmes" désireuses de se séparer d'une unité de production à "la céder à un repreneur" afin d'éviter son démantèlement. Cette promesse avait suscité beaucoup d'espoirs, puis de désillusions.

Ce nouveau projet aujourd'hui présenté par le gouvernement, "ça ressemble à la loi Florange qui repasse par la porte-fenêtre", a commenté Xavier Lecoq, responsable CFE-CGC chez ArcelorMittal à Florange, sans avoir pu prendre connaissance du projet de loi lui-même.

"C'est un feuilleton qui n'en finit pas", "est-ce que ça va passer au Conseil constitutionnel'", s'interrogeait-il.

Sylvain Niel, avocat chez Fidal, craint "un casse-tête épouvantable". "On nous invente des dispositions légales avec des objectifs certes louables mais pas forcément réalistes", dit-il à l'AFP avant de conclure: "Cela devient d'une complexité extraordinaire de fermer un site".

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